Saturday, December 16, 2006

Les voies de la politique

Je reçois régulièrement des questions portant sur la politique aux Etats-Unis, il est temps d'y répondre, surtout que j'ai eu plusieurs mois pour mûrir ce sujet... Alors laissez-moi vous dire que la politique, ce n'est pas un sujet qu'on aborde en société. D'abord c'est chiant. Ensuite, ça fâche. Enfin, ce n'est pas fun. Bon après ces simplifications, quelques exemples pour illustrer tout ça et le contredire:

Les élections de novembre ont beaucoup plus passionné le monde que les Américains eux-mêmes. Le débat politique, d'après ce qu'il m'en a semblé, a été pas mal eclipsé par les scandales de corruption (autant financière que morale) frappant les personnalités républicaines... D'autre part, les grandes questions nationales (comme la guerre en Iraq) sont certes très importantes, mais au moment même du vote elles sont diluées parmi tout un tas de questions de politique locale, allant de l'élection du shériff ou du juge, au vote sur les propositions citoyennes concernant la réforme globale de la politique fiscale, la réglementation de la distance légale entre la stri-teaseuse et le client de la boîte de strip-tease, la suppression de la subvention phénoménale accordée à l'équipe de basket de Seattle, les Sonics, qui n'a pas gagné un match depuis des années et réclame un nouveau stade, la réparation de telle route - et ils en auraient bien besoin, je suis effarée du mauvais état des rues aux Etats-unis : les autoroutes sont bien entretenues, mais dans les villes même les grandes avenues sont pleines de trous, et à Seattle, dès qu'il pleut, on se croirait au Sénégal avec des routes impraticables... pourtant on ne peut pas vraiment dire que la pluie soit une condition météorologique exceptionnelle ici.. hum...

Deuxième remarque générale sur la politique... J'ai suivi un cours de sciences politique le trimestre dernier. J'ai lu beaucoup de choses, appris beaucoup sur la "culture politique" aux Etats-unis et sa résistance à l'Etat providence. Mais j'ai été assez déçue du professeur : j'avais l'impression qu'il cherchait dans la science politique une science de prédiction des résultats électoraux... comme si ça servait au tiercé quoi! Je trouvais ça absurde, d'autant plus que chacun des cours (un séminaire en comité restreint, 7 élèves, et j'étais la seule fille...) comportait au moins une demi-heure de digression sur le baseball ou le poker. Cela m'ennuyait terriblement, surtout quand il était question de faire des paris, de tirer des prédictions pour gagner un maximum de fric. Je trouvais ça particulièrement immoral et cela dégradait beaucoup à mes yeux l'image du professeur, qui était censé être un intellectuel dans les hautes sphères de l'esprit plutôt que dans ces paris très bassement matériels. Jamais de débat idéologique ou philosophique sur la politique américaine: j'en étais frustrée (d'ailleurs je me venge beaucoup en privé. On va encore dire que les Français sont anti-américains...).

Mais finalement je crois que j'en ai appris beaucoup sur la culture politique américaine, "politique du poker": tâter le terrain, bluffer, et essayer de gagner un max.

Mais en écrivant mon "final paper" pour ce cours, un commentaire d'un discours d'une personnalité politique américaine, j'ai trouvé autre chose que cette politique du cynisme. J'ai choisi de commenter le discours de Barack Obama, Sénateur black de l'Illinois, très en vogue dans les médias et dans l'opinion, au point qu'on peut vraiment parler d'un "phénomène Obama".

Il s'est fait connaître en 2004, lors du discours de clôture de la Convention Démocrate, où il appelait à un nouveau consensus national, surmontant les fausses divisions morales pour trouver un nouveau souffle politique, et croire en une politique de l'espoir. L'expression "the audacity of hope" est devenu son leitmotiv, et le titre de son bouquin paru en 2006 et déjà best-seller -

Obama est désormais ovationné partout et tient des meetings à travers l'Amérique où il est accueilli comme une star de ciné, et raconte, avec beaucoup de modestie, son parcours politique improbable, lui le "skinny little boy with a funny name", et sa vision d'une Amérique plus juste (avec un salaire minimum plus décent et une couverture maladie globale) . Dans le NYT, le gouverneur du New-Hampshire racontait qu'il avait programmé la salle pour les Rolling Stones, puis qu'il avait annulé le concert ensuite en réalisant qu'Obama ferait davantage d'entrées ( http://www.nytimes.com/2006/12/11/us/11obama.html )... Alors, prochain président des Etats-Unis ? La route sera longue et difficile mais sincèrement le personnage m'est très sympathique (en plus il est plutôt charmant, non?)

1 comment:

yasmine said...

Voyez l'article du Monde du 4 janvier 2007: http://abonnes.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3230,36-852001@45-1,0.html ...
Bon je suis aussi tombée dans l'Obamania, mais il faut dire qu'il a de quoi séduire tout de même...