Saturday, April 26, 2008

Cultivons notre jardin





Je me répète, pour ceux qui suivent mon blog; et je parle trop souvent de la météo.. mais il faut dire qu'après des jours de pluie, de grèle et même de neige, revoir le soleil c'est un peu renaître.




Alors aujourd'hui tous ceux qui n'étaient pas dans les parcs à faire des barbecues tondaient la pelouse. En allant acheter des saucisses pour le petit déjeuner (de petites saucisses au sirop d'érable...) je suis tombée sur des fleurs en promo, je me suis dit : bon je ne vais pas à la prison aujourd'hui, je fais du jardinage. J'avais déjà planté à l'automne un cerisier Kwanza du Japon, qui s'est décidé enfin à fleurir (après tous ceux de l'université, sur les photos ci dessus) et me remplit de joie.







Et puis comme la perspective d'une pénurie alimentaire pointe à l'horizon, mais pas assez sérieusement aux Etats-Unis pour que je sois vraiment sérieuse dans mes choix agricoles, j'ai aussi planté du persil, du basilic et des carottes. Et aussi des tournesols offerts par le Dalai Lama pour faire grandir la compassion dans nos coeurs.

Entre cela et la lecture de Torture and Democracy par Darius Rejali (un livre pas très joyeux mais fascinant, une sorte d'encyclopédie des pratiques de torture "propre" développées par les régimes démocratiques. La mise à l'isolement en prison finalement ressemble beaucoup à cela...), je suis allée à un barbecue sur un bateau (il y a plein de gens qui habitent sur des bateaux, ou des maisons-bateaux boathouses sur les lacs de Seattle) et puis à un concert de Qawali, chants soufis pakistanais (les frères Shreh et Mehr Ali, et leurs fils), magnifique...

Un truc intéressant aussi pour les amateurs de Kurt Cobain: en allant à la prison de Stafford Creek la semaine dernière je suis passée par Aberdeen, une ville inintéressante au possible, déprimante, et dont le panneau d'acceuil à l'entrée dit "Come as you are". Je vous écris ça assise dans mon salon, à boire du mauvais vin californien, en écoutant Cody qui a entrepris d'enseigner la guitare à Sayeeda (je vous mets la photo mais probablement pas pour longtemps parce qu'elle va probablement hurler si elle découvre que j'ai fait ça...)

Thursday, April 17, 2008

Kader Attia


Je suis enfin allée voir l'exposition des oeuvres de Kader Attia, artiste français d'origine algérienne, à Henry Art Gallery, le petit musée d'art contemporain de l'université.
Kader Attia était en résidence à Seattle au mois de février - je n'ai pas pu assister au vernissage de l'exposition ni à sa présentation, et je le regrette car ses oeuvres sont d'une force et d'une poésie extraordinaires.
Le visiteur arrive par une passerelle qui surplombe une grande salle, où sont agenouillées de fragiles sculptures de papier aluminium. Ce sont des hommes en prière. Plus d'une centaine se recueillent dans leur corps frêle, le dos courbé devant l'immense lumière. Humble état de mortel. Et lorsqu'on descend au niveau de ces prieurs, que l'on s'approche de leur corps et de la ligne nette de la colonne vertébrale, leur visage surgit, immense vide, questionnant l'infini.

Dans la salle qui jouxte les hommes en prière se dressent des cubes blancs, massifs mais un peu chancelant, comme une forêt incertaine d'obstacles et de poésie. Les photographies de la plage d'Alger "Rochers Carrés" donnent une clé de lecture pour ce monument qui rappelle aussi bien le monument de l'holocauste à Berlin que les HLM en France. Il faut marcher entre les cubes et ressentir cette peur enfouie - cela va-t-il me tomber dessus, m'engloutir ?

Une autre installation : les sacs plastiques vides. Une poésie de l'ordinaire qui prend tout son sens avec le petit récit des promenades de l'artiste le soir à Paris, rencontrant des pauvres gens leur plastique vide à la main, venus attendre la distribution de la banque alimentaire. La simplicité évidente de ces quelques sacs exposés sur une table à tréteaux en bois.

Enfin, une vidéo. Belle et efficace. C'est un grand cube blanc formé de centaines de petits cubes de sucre. Un bâtiment. Un iceberg bien géométriques si vous voulez. Des jets de pétrole sont lancés sur le cube et créent de jolies taches noires. Jolies taches noires. Jolies taches noires. Jusqu'à ce que le cube imbibé de pétrole commence à chanceler, et un pan de l'édifice s'effondre. Le pétrole continue à couler. Passe à travers le sucre, ressurgit en dessous. Le cube tout entier s'effondre et les petits morceaux géométriques flottent sur la mare noire, en scintillant. Et c'est toujours en scintillant que peut à peu le sucre se dissout dans une purée infâme qui s'écoule par tous les bords.

Friday, April 11, 2008

Graines de Compassion

Je suis, avec ma copine Delphine, la voix du dalaï lama sur internet... nous traduisons les discussions de l'événement "Seeds of compassion" pendant les cinq prochains jours, à Seattle. Vous pouvez voir les vidéos sur le site de l'événement (cliquer sur français pour avoir ma voix; sur l'arabe pour avoir la voix de ma copine Amel; sur l'allemand pour avoir la voix de ma copine Lissy; il y a aussi russe, espagnol, amharic, italien, hébreu, penjabi, polonais, hindi, mandarin etc)
Merci de votre indulgence; nous ne sommes pas professionnels et la traduction simultanée c'est vraiment difficile. Bon et aussi ils ont mis les conversations off sur le site mais on n'a rien dit de non compassionnel alors ce n'est pas grave...
Et puis le soir Zied est venu avec sa chérie Américano-Tibétaine qui est chanteuse et qui nous a chanté le Tibet sera libre.... : l'écouter ici

Wednesday, April 02, 2008

Utah


Utah, c'est le pays des Mormons, ou "LDS" (Last Day Saints). Le 21 septembre 1823, Joseph Smith (que son nom prédestinait à une existence exceptionnelle) reçut la révélation du dernier livre de la Bible et fonda la religion du nouveau monde. A vrai dire je ne sais pas trop ce qu'elle contient, à part ce qu'on en trouve sur wikipedia, les habituelles critiques de la polygamie, et les rumeurs concernant les dessous sacrés (sacred underwear - imaginez Mitt Romney en porte jarretelles bénis...).

Je n'ai pas appris grand chose lors de mon séjour à Salt Lake City, sinon que LDS avait beaucoup d'argent (un immense temple, un immense centre de conférence, un musée, une banque appelée "Zion Bank" etc) et que tous ceux qui n'étaient pas Mormons les haïssaient. Plutôt ruraux (on cache mieux ses multiples femmes à la campagne qu'en ville, disent les mauvaises langues) les Mormons sont une minorité à Salt Lake City, une ville démocrate dont le maire est réputé pour ses positions libérales (au sens américain; ie à gauche).




A part le grand temple des Mormons - dans lequel on ne peut pas entrer mais qui, selon la brochure distribuée par les gentilles volontaires chinoises, ressemble beaucoup à un hôtel de luxe à l'intérieur -, Salt Lake City est connue pour les Jeux (eh non, pas pour le lac; malgré mes demandes répétées je n'ai pas pu le voir : à chaque fois que j'ai mentionné le sujet on m'a répondu que le lac puait et était de toutes façons complètement inintéressant, et qu'il n'y avait bien que des Mormons pour avoir l'idée de construire une ville près d'un lac si salé que seules des crevettes rachitiques peuvent y survivre. Pour la petite histoire, ces crevettes font l'objet d'échanges économiques intéressants: envoyées en Asie pour nourrir des gambas renvoyées par delà l'océan pour le régal des riches Mormons dégustent dans leurs restaurants). Les Jeux donc; SLC est entourée de montagnes enneigées. Park City, à quelques miles, abrite une des plus grandes stations de ski des Etats Unis: un domaine skiable immense, qui donne vue sur toute la vallée.



Le sud de l'Etat, c'est le désert: un désert de roches sableuses, ocres beiges, jaunes et rouges; canyons et falaises; sculptures tracées par le temps et le mouvement terrestre; glaces oubliées à l'ombre des roches, sables cryptobiotiques.









Les vacances furent courtes mais j'ai pu faire du ski, grimper des falaises dans le désert, bronzer et peler et rebronzer et attraper un rhume dans le froid nocturne; lire To Kill a Mockingbird de Harper Lee; apprendre les mouvements de base du yoga avec David, un philosophe des bois, qui nous avait construit une sweatlodge l'été dernier, lit Nietzche en version originale et connaît tous les recoins du désert d'Escalante.